Tribune signée par Corinne Lepage, ancienne Ministre de l’Environnement, Dominique Bourg, philosophe, Philippe Desbrosses, Co-fondateur du Label AB. Jean Marc Governatori co-secrétaire national de l’Alliance écologiste indépendante
L’économie mondiale et des millions d’emplois en France sont aujourd’hui à la merci d’un virus.
L’ampleur de cet événement est-t-elle suffisante pour nous faire comprendre qu’il faut en finir avec notre société consumériste et productiviste qui pollue air, eau et terres autant que notre santé et nos relations humaines ?
Son impact nous invite à remettre véritablement en cause notre mode de vie et notre façon de penser : sortir du toujours plus avoir, pour aller vers le toujours mieux être, prioriser et développer l’esprit de partage autant que l’éducation à la santé, autant que l’agriculture durable, autant que le respect des énergies consommées pour que nos territoires tendent vers l’autonomie énergétique et l’autonomie alimentaire.
Les drames humains, économiques et sociaux du Covid-19 sont le dernier avertissement avant que de prochains phénomènes irréversibles, issus de notre façon d’être actuelle, aient pour conséquences la fonte des glaciers sur l’ensemble de la planète, l’acidification des océans, l’abattage chaque année de 15 millions d’hectares de forêts dans le monde qui induisent un dérèglement climatique extrême, insupportable pour l’espèce humaine. Ils bouleversent et bouleverseront nos vies, engendreront des dizaines de millions de réfugiés climatiques et autant de souffrances.
Nous avons même été capables de créer un continent de plastics flottant d’une surface égale à 3 fois celle de la France (1,6 million de km2 dans l’Océan Pacifique).
Le désastre économique et social qui se prépare, dû à l’incroyable impréparation sanitaire et l’insouciance de nos gouvernements, est le prémisse de ce qui va nous arriver dans les prochaines années à cause de notre façon de vivre
Le Coronavirus serait-il là pour nous apprendre à respecter les écosystèmes représentés par les terres, les mers et les océans, respecter les forêts et nos corps ? Comme la biodiversité. Comme l’air que nous respirons.
Cette expérience de confinement nous aide à constater que l’existence ne se limite pas à travailler et à consommer. C’est aussi apprécier la valeur de l’instant présent et faire des pauses.
Nous pouvons transcender cette crise.
La qualité et la quantité de notre alimentation est essentielle en matière de santé et d’économie, en matière d’environnement et de paix civile. Pourtant, l’agriculture bio vivrière, paysanne, locale reste oubliée.
Il y a un formidable chantier de restauration de la planète, la purification des eaux, l’efficacité énergétique par l’isolation, la dépollution des terres, le reboisement des terres arides, la sauvegarde des variétés et espèces végétales et animales en perdition, le retour à des structures à la dimension humaine. À ces grandes œuvres, il y a aussi un merveilleux chantier au niveau de l’éducation de nos enfants, du respect de la terre et des êtres vivants, du « produire et consommer localement » avec une agriculture sensible et consciente. La croissance intérieure de l’être humain est le secteur à plus forte croissance, parce que tout est à bâtir dans l’être humain qui a peu cultivé sa façon d’être.
Covid-19 nous aura démontré les désagréments causés par la faiblesse des relations humaines que notre société productiviste et consumériste génère. Pendant et après cet épisode, nous avons à développer l’esprit de partage, missionner et accompagner les activistes écologiques et les activistes citoyens, susciter des comités locaux de liaison par quartier, les jardins potagers communautaires, le compostage collectif, les monnaies locales complémentaires, les banques d’échanges (temps et produits), les S.E.L, les Amap, le Ric, le sport, la culture, une nouvelle éducation permettent de construire ensemble un territoire où se développent les principes de fraternité et de co-responsabilité.
Avec un masque, des gants ou à un mètre les uns des autres, pour l’instant.
Terre-mère, Terre-nourricière, vraie merveille, garante de notre confort et de notre bien-être. Sachons la préserver à notre tour pour les siècles, et les générations à venir, car au moment où nous perdons encore en France, une ferme toutes les 20 minutes, hémorragie silencieuse d’un exode rural qui dure depuis 50 ans, et a vu passer des millions d’agriculteurs à la trappe, il est temps de se rappeler que la nourriture est le premier de nos besoins. L’agriculture est la première des fonctions indispensables à l’humanité. Or, il est impossible de cultiver la terre sans Paysan.
Les grands enjeux auxquels l’humanité est confrontée : la faim, la pauvreté, la maladie, l’environnement… dépendront dans notre aptitude à élaborer de nouvelles organisations sociales intelligentes, capables d’embrasser l’absolue complexité du monde pour y faire face. Notre enjeu principal aujourd’hui c’est la Conscience collective réalignée sur le partage et la coopération, et non sur la compétition…